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La semaine du droit bancaire

Affaires - Banque et finance
25/05/2020
Présentation des dispositifs des derniers arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation en droit bancaire.
Emprunt – faute des deux parties
« Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 27 mars 2018), suivant offre acceptée le 7 mai 2013, la société Sygma banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance (la banque), a consenti à Monsieur et Madame X (les emprunteurs) un prêt de 18 500 euros destiné à financer la vente et la pose de panneaux photovoltaïques par la société Compagnie énergie solaire (le vendeur).
Invoquant l'absence de raccordement de l'installation, les emprunteurs ont assigné le vendeur, pris en la personne de son liquidateur judiciaire, et la banque en résolution des contrats et en réparation de leur préjudice
Après avoir constaté la livraison des panneaux photovoltaïques, mais l'absence de démarches en vue de leur raccordement au réseau, et prononcé en conséquence la résolution du contrat de vente et celle du crédit affecté, ainsi que la déchéance du droit aux intérêts, l'arrêt relève, d'abord, que la banque a libéré les fonds sans s'assurer que les emprunteurs avaient régularisé le contrat principal, lequel a été conclu le 24 octobre 2013, postérieurement au certificat de livraison signé le 6 août 2013 par Monsieur X et le 9 octobre suivant par son épouse, et qu'elle a ainsi engagé sa responsabilité.
Il retient, ensuite, que les emprunteurs ont eux-mêmes fait preuve de légèreté en acceptant la mise en oeuvre à leur domicile de l'installation, avant même la signature du contrat de vente, et en certifiant, d'une part, l'exécution d'un contrat en réalité inexistant, d'autre part, l'exécution d'une prestation en vérité inachevée.
Ayant ainsi déduit de ces constatations que les parties avaient chacune commis une faute, la cour d'appel a pu décider que les emprunteurs étaient tenus de rembourser le capital prêté, sous déduction de la somme de 9 000 euros dont elle a souverainement estimé qu'elle réparerait le préjudice subi par eux du fait de la faute de la banque.
Le moyen n'est donc pas fondé »
Cass. 1re civ., 20 mai 2020, n° 18-23.529, P+B*
 
Prêt consenti pour les besoins d’une activité professionnelle – Action des professionnels pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs – prescription
« Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 8 janvier 2019), par acte authentique du 8 septembre 2000, la société BNP Paribas (la banque) a consenti un prêt professionnel à Monsieur et Madame X (les emprunteurs). Puis, suivant actes authentiques des 25 août et 2 octobre 2003, la banque leur a consenti une ouverture de crédit par découvert en compte.
Se prévalant d’une créance au titre de ces actes, la banque a engagé une procédure aux fins de saisie des rémunérations de Madame X. Cette dernière a soulevé la prescription de la demande en application de l’article L. 137-2 du Code de la consommation.
(…)  Vu l'article L. 137-2, devenu L. 218-2 du Code de la consommation :
Aux termes de ce texte, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans. Il en résulte que cette prescription ne s’applique pas aux actions fondées sur un prêt consenti pour les besoins d’une activité professionnelle.
Pour déclarer prescrite la demande de la banque, après avoir constaté que les actes des 8 septembre 2000, 25 août et 2 octobre 2003 avaient été conclus pour les besoins de l’activité professionnelle de Monsieur X »
Cass. 1re civ., 20 mai 2020, n° 19-13.461, P+B*

Prêt immobilier – dérogation aux règles du Code civil
« Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 10 juillet 2018) et les productions, la Caisse de crédit mutuel de Villers-le-Lac (la banque) a consenti à Monsieur et Madame X (les emprunteurs) deux prêts immobiliers, le premier, suivant offre acceptée le 22 octobre 2007, d'un montant de 170 000 CHF remboursable in fine le 31 octobre 2019 au taux de 2,15 % l'an, stipulé variable en fonction de l'évolution du Libor 3 mois et ne pouvant varier de plus de deux points à la hausse, le second, suivant offre acceptée le 16 juin 2010, d'un montant de 1 202 100 CHF remboursable en trois-cents échéances au taux de 1,80 % l'an, stipulé variable en fonction de l'évolution du Libor 3 mois et cette variation étant encadrée pendant les vingt premières années d'amortissement du prêt par un plafond à 3,60 % ainsi qu’un plancher à 0,00 % l’an
Vu les articles 1902, 1905 et 1907 du Code civil, et L. 313-1 du Code monétaire et financier :
Constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d’une autre personne. Dans un contrat de prêt immobilier, l’emprunteur doit restituer les fonds prêtés dans leur intégralité, les intérêts conventionnellement prévus sont versés à titre de rémunération de ces fonds et, dès lors que les parties n’ont pas entendu déroger aux règles du Code civil, le prêteur ne peut être tenu, même temporairement, au paiement d’une quelconque rémunération à l’emprunteur.
Pour dire que la banque devra appliquer aux prêts litigieux un taux d’intérêt indexé au taux Libor 3 mois à sa valeur réelle, pouvant conduire à des intérêts mensuellement négatifs, l’arrêt retient que, les deux prêts étant stipulés à un taux d’intérêt initial, l’un de 2,15 % et l’autre de 1,80 % l’an, variables à la hausse comme à la baisse, les parties se sont accordées pour que ces intérêts soient à la charge de l’emprunteur et non du prêteur, et que la banque, en proposant des taux d’intérêt variables à la hausse comme à la baisse, et les emprunteurs en y souscrivant, ont accepté le risque inhérent à cette variation, mais que le respect des contrats litigieux impose que, pour les deux prêts, soit appliqué un tel taux d’intérêt à condition que, sur l’ensemble du remboursement de chaque prêt, les intérêts dus au prêteur ne soient pas inférieurs à 0,00 %.
En statuant ainsi, la cour d’appel, qui a admis l’éventualité d’intérêts mensuellement négatifs, alors qu’il résultait de ses constatations que les parties n’avaient pas entendu expressément déroger aux règles du Code civil, a violé les textes susvisés
 »
Cass. 1re civ., 25 mars 2020, n° 18-23.803, P+B*


 *Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 25 juin 2020
 
 
 
 
Source : Actualités du droit