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Visioconférence devant les juridictions pénales : le Conseil d’État suspend

Pénal - Procédure pénale
15/02/2021
Le Conseil d’État a suspendu, dans une décision du 12 février 2021, les dispositions permettant, au titre de l’état d’urgence sanitaire, d’imposer la visioconférence devant les juridictions pénales. 
Le 18 novembre 2020 a été prise une ordonnance portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière pénale (Ord. n° 2020-1401, 18 nov. 2020, JO 19 nov., v. Covid-19 : nouvelle ordonnance d'adaptation de la justice pénale, Actualités du droit, 19 nov. 2020). L’objectif était de permettre la continuité de l’activité des juridictions pénales essentielle au maintien de l’ordre public.
 
Son article 2 étend la possibilité de recourir à la visioconférence devant l’ensemble des juridictions pénales, y compris devant les juridictions criminelles une fois l’instruction à l’audience terminée, ainsi que pour les présentations devant le procureur de la République ou le procureur général sans qu’il soit nécessaire de recueillir l’accord des parties.
 
Rappelons alors que le 25 novembre 2020, le Conseil d’État a déjà suspendu cette mesure en ce qui concerne les audiences devant les juridictions criminelles (Justice pénale et visioconférence : ça coince, Actualités du droit, 27 nov. 2020).
 
Le juge des référés a été saisi d’une nouvelle demande émanant de plusieurs organisations représentants les avocats. Ils soutiennent « que ces dispositions portent une atteinte grave et manifestement illégale aux droits de la défense et à un procès équitable, qui comprennent le droit de comparaître physiquement devant un juge et de ne pas se voir imposer une comparution par un procédé de communication audiovisuelle ».
 
Le Conseil d’État précise que le projet de loi ratifiant diverses ordonnances pour faire face à l’épidémie de Covid-19 en matière de procédures civile, pénale et administrative déposé sur le bureau du Sénat, prévoit la ratification « des dispositions des trois premiers alinéas de l’article 2 de l’ordonnance du 18 novembre 2020 en tant seulement qu’elles s’appliquent devant des juridictions pénales autres que criminelles ». Le projet ne porte pas sur les dispositions relatives aux juridictions criminelles, ces dispositions sont caduques et ne peuvent plus recevoir application, en vertu de l’article 38 de la Constitution.
 
Alors, les dispositions contestées, qui autorisent le recours à la visioconférence, sans l’accord des parties, devant les juridictions pénales autres que criminelles, « sans subordonner cette faculté à des conditions légales ni l’encadrer par aucun critère, portent une atteinte grave et manifestement illégale aux droits de la défense » soutient le juge des référés. Il rappelle également que le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution des dispositions similaires de l’ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation de règles de procédure pénale (Covid-19 : ce que prévoit l’ordonnance adaptant la procédure pénale, Actualités du droit, 25 mars 2020). En effet, elles prévoyaient qu’il pouvait être recouru à un moyen de télécommunication audiovisuelle devant les juridictions pénales autres que criminelles, sans qu'il soit nécessaire de recueillir l'accord des parties (Cons. constit., 15 janv. 2021, n° 2020-872 QPC, v. Covid-19 et visioconférence devant les juridictions pénales : censure du Conseil constitutionnel, Actualités du droit, 15 janv. 2021).
 
Il décide que « l’exécution des dispositions de l’article 2 de l’ordonnance du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière pénale en tant qu’elles autorisent le recours à la visioconférence devant les juridictions pénales autres que criminelles est suspendue ».
 
 
 
Source : Actualités du droit